lundi 27 décembre 2010

Les trois mille fantômes. Premier Conseiller.

Le massif du Néouvielle-Pic Long est intégralement en territoire français. Leurs crêtes granitiques se découpent dans le ciel et dans ses vallées d'innombrables lacs scintillent en bleu et vert.

En août 1787, Reboul et Vidal parviennent au Turon de Néouvielle, qu'ils désignèrent comme le sommet de la « Neige-Vieille de Caplongue ». Leur guide était S. Guichardnaud. Le dessein des deux savants était d'atteindre le sommet le plus haut, le Néouvielle. Tous ceux qui connaissent le lieu ne s'étonneront pas qu'ils se soient contentés de stationner sur le Turon, sans essayer de se risquer dans la traversée du Pic des Trois Conseillers, ce qui les aurait placés aux pieds de l'arête S-SW du Néouvielle. Le sommet du Néouvielle ou Pic d'Aubert ne sera foulé que 60 années plus tard. Le 10 juillet 1847, Chausenque en compagnie du guide Bastien Teinturier conquit le sommet depuis la Glère et la brèche qui, plus tard, prendra son nom. Chausenque est âgé de 65 ans. C'est curieux que ni Reboul, ni Vidal, à l'occasion de leur ascension considérée comme la première d'un trois mille pyrénéen, n'en aient eu la perception, puisqu'ils donnèrent comme altitude du Turon 1619 toises. Certes, il reste encore quelques années avant l'adoption du mètre comme unité de longueur.

Dans la crête qui relie le Turon de Néouvielle au Pic des Trois Conseillers se trouvent trois pointes, qui, d'après Robert Ollivier dans son « Guide des Pyrénées Centrales Vol. II », sont les trois conseillers qui donnent son nom au pic. Henri Beraldi néanmoins, dans son œuvre « Cent ans aux Pyrénées », écrit que le nom provient d'une réunion tenue dans la Brèche du Néouvielle par trois chasseurs de Barèges vers 1850. Ces trois chasseurs auraient été les premiers à atteindre le sommet... et s'en retourner par le même chemin vu l'aspect de la crête Ouest qui se poursuit vers le Turon. Cette crête fut parcourue la première fois par H. Brulle faisant équipe avec Célestin Passet et De Monts le 3 août 1891. Ils nomment le Pic des Trois Conseillers comme Petit Turon.

La toponymie du massif fut étudiée en profondeur dans le période 1900-1906 par Léon Maury, Denis Eydoux et le comte de Saint-Saud. Le nom ancien de cette montagne était Soum de Maniportet, toponyme du glacier situé au pied du versant nord. Maniportet veut dire mauvais passage, sans doute se référant à la Brèche du Néouvielle, d'usage sporadique en tant que passage entre la Glère et Cap de Long. Les avis raisonnés faits par la Commission de Topographie et de Toponymie de la Fédération de Sociétés Pyrénéistes plaidés pour garder l'ancien nom, passèrent, comme tant d'outres, à la trappe. Une énumération détaillée sur les dits travaux peut être trouvée dans l'œuvre de L. Maury « Les noms de lieux des Montagnes Françaises », París, 1929.

Dans la liste des cotes restantes de Buyse ne figure pas aucune de ces pointes-ci. Nous les nommerons en ordre croissant d'altitude, c'est à dire d'Ouest en Est, comme : Premier, Second et Troisième Conseiller. D'autre part l'altitude du Premier Conseiller figure dans le croquis fait par M. Angulo dans son livre « Pyrénées. 1000 ascensions » avec 3010 mètres et une proéminence de 15 mètres.

La 31 juillet 2007, il se vérifia que le gendarme le plus occidental, le plus petit, avec une altitude de 3035 mètres, offre une proéminence sur le col qui le relie avec le Turon de Néouvielle de 32 mètres, et vers le Second Conseiller de 14 mètres. Également on mesura le Second Conseiller, dont la cote est 3039 mètres, obtenant les proéminences de 18 mètres vers le Premier Conseiller et 9 mètres vers le Troisième.

Panorama depuis le sommet du Pic des Trois Conseillers. Remarquez l'aiguille du Premier Conseiller dans la crête qui le relie au Turon. (Auteur : Igertu)


Pic des Trois Conseillers vu du nord. Le Premier Conseiller se trouve à droite du sommet. (Auteur: Igertu)


Consultez l'activité dans le lien suivant :
Igertu : Trois Conseillers

Données techniques :

Premier Conseiller :......... 31T x: 263972 y: 4746247 z: 3035
Second Conseiller :......... 31T x: 264014 y: 4746280 z: 3039,1
Pic Trois Conseillers :...... 31T x: 264120 y: 4746313 z: 3045

FTer

mercredi 25 août 2010

Les trois mille fantômes. Incisive Orientale d'Alba.

Entre le Pic et la Dent d'Alba, à la fin occidentale de la longue crête principale des Monts Maudits, se présente le col Inférieur d'Alba (3023m), passage entre la vallée de Cregüeña au sud et la combe d'Alba au nord. Peu fréquenté car ce n'est pas simple de le traverser, il est plus pratique de passer par le col Supérieur. Les deux côtés du col présentent des aiguilles : une petite à l'ouest, au pied du Pic d'Alba, et deux plus importantes à l'est, devant la Dent d'Alba et au-dessus d'une saillie verticale existant sur le col.

Vue sur les Incisives d'Alba, cotes nº 1077 et 1078 depuis le Nord. Combe d'Alba. (auteur : Mattin)


Dans le livre de Buyse « Les 3000 des Pyrénées » elles figurent comme cotes restantes 1077 (occ.) et 1078 (or.), leurs altitudes étant respectivement de 3082 et 3087 mètres, tirées de la cartographie Alpina. Luis Alejos dans son livre « Pirineos, guía de los 3000 » les cite comme deux tours dans l'arête. Miquel Capdevila dans son œuvre « Los tresmiles en treinta jornadas », parle des deux aiguilles proches de la Dent d'Alba comme les Incisives d'Alba, nom que nous avons adopté. Vues en dehors de la crête, elles semblent deux petites pointes, aussi élégantes que la Dent d'Alba que peignit Russell et qu'il avait conquise en 1882. Nous ne savons pas qui sont les premiers grimpeurs : en date du 27 Juillet 1882, Brulle, Bazillac et Passet font la traversée à la course des Pics Occidentaux de la Maladetta au Pic d'Alba en 25 minutes! Auront-ils eu le temps pour lorgner la crête? Arlaud et ses compagnons fouillaient les alentours en 1930. Armengaud et les siens en 1954 et 1955.

Zoom sur les Incisives depuis le Nord. (auteur: Mattin)


18 Août 2008, accédant par la vallée de Cregüeña nous allons mesurer la proéminence de la pointe orientale, y trouvant une dénivellation de 14 mètres dans la brèche qui la relie à la Dent d'Alba, son altitude étant 3096,7 mètres. Nous accédons à la pointe occidentale le 22 Août 2009 directement de la vallée de Cregüeña (AD), son altitude 3092 mètres, et une proéminence de 8 mètres dans la brèche entre les aiguilles. Le passage entre les aiguilles peut se coter PD, descente délicate de l'aiguille occidentale sur rocher fragile, remontée de la brèche à l'aiguille orientale plus facile bien que le rocher soit semblable, la grande largeur du terrain permet de choisir le meilleur cheminement. L'accès et(ou) la descente de l'aiguille orientale se déroule par le couloir qui la relie à la Dent, très friable ; il faut rechercher le meilleur passage (F). L'aiguille orientale, elle-même, offre de ce côté un rocher de meilleure qualité, offrant une facile ascension (F+).

Vue depuis la vallée de Cregüeña. Signalée l'Incisive Orientale. (auteur: Igertu)


Données techniques :

Incisive Orientale d'Alba :........ 31T x: 305298 y: 4725361 z: 3096,7
Brèche Incisive-Dent :............. 31T x: 305307 y: 4725349 z: 3082,6

FTer

mardi 22 juin 2010

Les règles Buyse de classement des trois mille.

Dans les années quatre-vingt circule à Lérida une liste de trois mille, œuvre de Feliu Izard : c'est la liste du Centre Excursionista de Lleida. Juan Buyse, Belge naturalisé Espagnol, résidant à Siurana depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, pense qu'il peut l'améliorer.

Pour établir la liste complète des cimes pyrénéennes au dessus de trois mille mètres, Juan Buyse s'imposa, dès qu'il s'intéressa au sujet, des règles que devaient, à son avis, remplir tous les sommets pour être admis dans la liste.

Nous allons voir quelles étaient les dites règles et comme elles furent conçues.

Depuis sa première tentative de liste dans la revue Muntanya du C.E.C. en 1986, Buyse savait clairement qu'il fallait suivre unes règles pour l'admission de sommets. Il se disait, en essayant d'établir une liste définitive, qu'il serait plus aisé de se concerter sur des règles possibles à utiliser, que sur les sommets eux-mêmes. Le consensus sur les règles l'emportant, il ne restait qu'à les appliquer et la liste sortirait toute seule.

Nous trouvons dans Muntanya une ébauche de règles à caractère historique et topographique sur lesquelles il se base pour établir la liste qui en résulte.

« 1-La cime d'une élévation étant par définition son point le plus élevé. La plus haute cote, ou point culminant, rentre dans la première catégorie des montagnes dépassant les 3000 mètres. En théorie, une montagne, n'ayant qu'un point d'élévation maximal, peut seulement avoir un sommet (Exception qui confirme la règle : le Pic des Jumeaux, ainsi appelé pour avoir deux cimes de 3160 m). »

Déjà nous remarquons dans cette première règle, et c'est important, la future polémique sur les Pics des Jumeaux.

« 2-Les pics ou ressauts n'étant pas cimes, c'est à dire, l'élévation maximale d'une montagne, rentrent dans la deuxième catégorie, qu'ils soient antécimes, ou aiguilles, ou pointes secondaires.

2.1-Il existe quelques exceptions à cette règle, celles-ci sont envisagées et justifiées. Du moment qu'une antécime, une aiguille ou une pointe (géographiquement secondaires), ont un nom de pic -en général, car les pionniers découvreurs des Pyrénées les baptisèrent ainsi- elles sont, dans la pratique, jugées comme cimes par les pyrénéistes.

2.2-Le fait que d'une pointe qui n'est pas une cime débute une arête ou un contrefort latéral, ainsi que l'existence additionnelle de voies d'ascension propres à cette pointe-là, peuvent être des éléments décisifs pour son classement dans la première catégorie, comme cela arrive avec l'Épaule de l'Aneto. »


Buyse ajoute : « Pour les "exceptions", il y a autant de désaccord que de discussion. L'auteur confie que les deux sont minimes, et il se console en réfléchissant que (hormis le fait que la perfection n'est pas de ce monde) il n'a pas trouvé, ni lui ni personne parmi le plus grand nombre de compagnons de cordée qu'il a interrogé, nulle autre formule qui offre une probabilité de consensus supérieure. »

Depuis cette publication et grâce a la collaboration de Robert Ollivier, s'est formée la dénommée "Équipe des trois mille", constituée par des pyrénéistes des deux versants. Certaines réticences furent émises par quelques pyrénéistes français, vu les antécédents nazis de Buyse, pendant la guerre, sous les ordres de Léon Degrelle. Les jumeaux Ravier refusèrent de participer.

L'élan donné par l'Équipe fut décisif : deux ans après, en 1988, les règles ont été affinées et une liste presque définitive est publiée dans la revue Pyrénées. Les règles nouvelles restent comme ci-dessous :

« 1-Pour qu'une élévation quelconque, dont l'altitude dépasse 3000 mètres, puisse être considérée comme un "trois mille" et être admise dans le Catalogue des "trois mille" des Pyrénées, elle doit remplir les conditions suivantes :
-Figurer sur au moins une des cartes actuelles et/ou être mentionnée dans un topo-guide en circulation. -Avoir été baptisée, c'est-à-dire avoir un nom.

2-Les "trois mille" admis seront classifiés, selon leur caractéristiques, dans l'une ou l'autre de ces catégories :
2.1-Seront classés dans la première catégorie, appelée celle des pics principaux :
a)les pics qui constituent le (seul) point culminant de chaque montagne (marqués PCM dans la liste), et
b)les pics qui constituent un noeud d'arêtes, placé sur les arêtes des montagnes ou sur les crêtes qui les unissent entre elles, à condition qu'ils aient au moins trois arêtes, et que toutes leurs arêtes soient descendantes du sommet même du pic, dont elles délimitent les versants (marqués NA dans la liste).
2.2-Seront classés dans la deuxième catégorie, appelée celle des pics secondaires : toutes les élévations (principalement antécimes, pointes et aiguilles) qui ne remplissent aucune des deux conditions formulées à l'article 2.1.

3-Les cotes supérieures à 3000 mètres qui sont mentionnées sur les cartes ou dans les topo-guides, mais qui n'ont pas de nom seront considérées cotes restantes et sont relevées dans une liste sous ce titre. »


Une disposition supplémentaire transitoire permettra, seulement à cette occasion, de donner un nom à ces cotes restantes qui restent anonymes bien qu'en ayant les caractères de la règle 2, aux yeux de l'Équipe. Cette disposition permet de les repêcher pour les inclure dans le Catalogue.

« 4-Une fois effectué le recensement de toutes les cotes restantes, et vu l'existence d'élévations qui ont les caractéristiques de pics secondaires, mais ne peuvent être admises comme telles, vu qu'elles sont anonymes, nous leur donnons, par décision majoritaire, un nom provisoire (dans le but de pouvoir les identifier) ce qui nous permet de les classer parmi les pics secondaires.
...
Du fait que ce but a pu être atteint grâce à l'application de la présente disposition, nous déclarons que cette application a été unique et ne peut plus être répétée. A l'avenir, seuls pourront être admis comme "nouveaux" trois mille, ceux qui remplissent les conditions de la règle nº 1. »


Couverture de la revue Pyrénées nº 154 contenant la liste des trois mille de Juan Buyse.


De la parution de la liste résultante (qui comprend 125 pics principaux, 70 pics secondaires et 74 cotes restantes) viennent les complications qui entraîneront la dissolution de l'Équipe des trois mille. Quelles furent ces divergences ? Eh bien, la polémique sur les Pics des Jumeaux, que nous avons vu venir de loin, et les noms choisis par Buyse pour réaliser les nouveaux baptêmes préconisés dans la disposition transitoire.

Problèmes : Changer la tradition de nommer Pics des Jumeaux aux cotes 3125 et 3160 pour rebaptiser la cote 3125, Jumeau Nord, pour Pic du Vétéran (surnom de Buyse), et le nom du Jumeau Sud pour Pic des Jumeaux, faisant allusion à Jean et Pierre Ravier, baptême refusé manifestement par les jumeaux bordelais. Baptême de deux pointes à l'Est du Pic Perdu comme Pics de Baudrimont, au lieu des noms de Rabadá et Navarro que la FAM proposait. Prétention de changer le Pic du Portillon d'Oô par le nom de Robert Ollivier, aussi refusé catégoriquement par le même Ollivier. Nommer une pointe voisine du Seilh dera Baquo du nom d'Audoubert, également refusé par l'intéressé.

Les règles que nous avons vu exposées dans la revue Pyrénées sont les mêmes qui paraissent dans la première édition du livre Los tresmiles del Pirineo, publiée en 1990. Signalons qu'à cette date, restent seulement les dernières braises de l'Équipe des trois mille. Nous n'allons pas répéter ce texte car il est pratiquement identique au précédent.

Couverture du livre de Juan Buyse. Première édition en espagnol, 1990.


Couverture du livre de Juan Buyse. Édition en français, 1991.


En 1993, avec la parution de la troisième édition du livre en espagnol, le nombre de trois mille compris dans le Catalogue passe de 196 (premier livre) à 212. Dans les règles, une nouveauté importante fait son apparition dans l'article nº 1 :

« 1.3-Avoir, débutant du sommet, seulement d'arêtes descendantes avec une dénivellation au minimum d'à peu près 10 mètres entre la cime et un éventuel col où la descente s'interrompt ou finie. »

Cette nouvelle disposition met en évidence, au moment de considérer des élévations méritant d'être incluses dans le Catalogue, le concept de proéminence. Cette nouvelle règle est donc utile pour parfaire la liste du premier livre, étant donné qu'en plus de l'ajout de nouvelles cimes (24), il y a aussi des cimes qui sont déclassées car n'ayant pas ce concept (8).

Nous remercions Juan Mari Feliu, qui remarqua que c'est Henri Baudrimont qui établit la valeur de dix mètres comme limite de la proéminence à retenir.

Couverture du livre de Juan Buyse. Troisième édition en espagnol, 1993.


Il est clair que l'application de cette nouvelle règle met en évidence deux idées :
a) Que la disposition additionnelle d'usage unique, qui s'utilisa pour baptiser des cimes anonymes et permettre leur inclusion au Catalogue, soit utilisée une deuxième fois, étant donné que maintenant 24 cimes, avant anonymes, ont pris un nom. Qui peut dire désormais qu'elle ne soit à nouveau réutilisée ? Quel sens a alors son existence ? Mais sa disparition implique que tout l'article 1 précédent manque de sens : mais le pyrénéisme a-t-il découvert et nommé absolument tout?
b) Dès l'instant où la détention d'un nom ou la parution dans une carte ou topo-guide ne sont plus des éléments déterminants, il reste comme seul principe valable la proéminence du point haut et la mesure établie pour elle.
Alors on ne peut pas dire que la liste soit définitive.

Buyse a du penser cela, car dans la cinquième édition du livre en espagnol, en 1998, il écrivait à la page 530 : « Mais je demande l'attention du lecteur sur une question qui est importante et même transcendantale : d'éventuelles recherches justifieraient-elles la modification d'un recensement qui, depuis tant d'années, est reconnu et employé par la communauté pyrénéenne ? Nous ne le pensons pas, c'est pourquoi nous nous sommes efforcés d'emporter un consensus que nous avons obtenu de l'éditorial et de l'UIAA... »
Effectivement, Buyse veut que l'UIAA agrée de quelque manière sa liste, ce qu'il atteint comme le montre une lettre datée 14 septembre 1995, expédiée par le Dr. Claudio Abächerli, et la parution de la liste de la troisième édition du livre dans la Bulletin UIAA nº 152 de décembre 1995.

De cette manière il essaye de fermer la liste à de nouvelles incorporations, spécifiant clairement que celles-ci, si cela devait se produire, seront placées dans une annexe à part de la liste.

Buyse prévoit dans la cinquième édition une remise à jour tous les dix ans, la prochaine étant prévue pour 2002. En raison de son grand âge il délègue la tâche de continuer le travail sur les trois mille à deux coordinateurs, un pour chaque versant, Juan Mari Feliu au sud et Jean-Louis Aranjo au nord. Depuis son décès le 26 Juillet 2002 à Siurana, ce travail s'interrompt définitivement.

FTer




Addenda, 12 avril 2016.

La récente parution, janvier 2016, d'une œuvre traitant du militantisme nazi de Buyse lors de la guerre 39/45 et des années précédentes, est venue faire la lumière sur l'affirmation que nous donnions lors de la publication de cette entrée. L'information que nous avions alors provenait d'une lettre de janvier 1989 dans laquelle les frères Ravier communiquent à Buyse leur abandon de l'Équipe. Là, le leader nazi belge Léon Degrelle est cité. La réponse de Buyse essaye de justifier sa conduite passée, s'en tenant à sa participation comme volontaire dans la lutte contre le communisme sur le Front de l'Est.

Le livre publié éclaircit le passé véritable de Juan (Jan) Buyse, qu'il tentait de dissimuler. On peut dire, par conséquent, que Buyse ne fut jamais aux ordres de Degrelle et que les Ravier firent bien, même sans connaître toute la vérité, de rompre les relations.

L'œuvre, en catalan, très recommandable pour qui désire approfondir le sujet, est :
(ORENSANZ) Toni. El nazi de Siurana. Barcelona, Ara Llibres, 2016, 291p + photographies.

FTer

dimanche 16 mai 2010

Les trois mille fantômes. Tuqueta de Marboré.

On pourrait imaginer que trouver un trois mille fantôme demande une observation attentive du terrain, à la recherche de cette aiguille cachée ou peu visible qui ne figure nulle part. Cela n'est vrai qu'à moitié. C'est le cas de la proéminence examinée dans cette page.

Dans le triangle formé par le Pic du Marboré, les Pics de la Cascade et le Cylindre, sorte de no man's land d'une étendue très respectable au-dessus des trois mille mètres, domaine karstique, rempli de dolines et gouffres, il y a une série de collines dues à l'érosion ; cotes restantes d'après Buyse : 1024, 1025, 1030 et 1031. Ces cotes forment le côté sud du dit triangle, interrompu à peu près en son milieu, là où débouche tout le bassin qui donne naissance à l'Arazas. Le ruisseau disparaît là sous terre pour ressortir des centaines de mètres plus bas. La voie normale de Góriz vers le Pic du Marboré se trouve aux alentours.

Il se trouve que la cote 1031 du livre de Buyse est en pleine vue, mais elle n'attire pas l'attention. N'imaginons pas une cime normale, cette cote est, par sa nature morainique, le reste de l'érosion produite par un glacier, aujourd'hui disparu, qui nichait dans le versant ouest du Cylindre de Marboré. En réalité, elle est tellement plane, qu'elle ne ressort que sur les courbes de niveau des cartes. Ce fait noté, il était le temps d'aller voir sur le terrain à quoi ressemble cette cote.

Cote nº 1031 dans la carte IGN.


À la fin d'octobre 2006 la neige est présente au-dessus des 2800 mètres. En partant du col de Tentes, nous atteignons aux premières lueurs la Brèche de Roland. Nous poursuivons la traversée des terrasses méridionales du Marboré, jusqu'à atteindre le passage qui va nous permettre l'accès vers le Pic du Marboré. Un mur à pic d'une centaine de mètres de hauteur barre l'accès direct vers la cote 1031. Nous nous détournons vers la droite en direction du couloir qui monte au col situé entre le Cylindre et le Piton SW. Tout de suite, par une rapide pente, nous pouvons dévier vers notre gauche et atteindre le collet qui relie le Cylindre et la cote. Une douce pente nous mène au point culminant. Nous vérifions qu'il existe plus de dix mètres de proéminence, en accord avec ce qui est signalé sur la carte. Nous descendons par le ravin formé entre la cote et le Pic du Marboré : Canal Tuerta selon la cartographie Prames. Un compte-rendu plus détaillé de la sortie peut être trouvé dans la revue Pyrenaica nº 230 année 2007.

En aout 2007 on mesure au moyen de GPS la proéminence de la cote, trouvant une valeur de 12 mètres.

Vue de la cote nº 1031 depuis le versant du Cylindre.


En ce qui concerne son identification nous proposâmes pour elle le nom de Tuca de Marboré. Un pyrénéiste aragonais nous prévenait que le mot Tuca prend la signification de Pic, donc nous introduisions un élément de confusion avec le vrai Pic du Marboré. Pour l'éviter, et en suivant la toponymie utilisée chez Prames, il semble plus convenable de la nommer comme Tuqueta de la Canal Tuerta ou Tuqueta de Marboré.

Malgré la fréquentation ancienne de cette zone, (rappelons-nous que c'est le chemin traditionnel du Mont Perdu par la France), il n'existe, que nous sachions, nulle citation de cette proéminence, ce qui est amusant.

Panoramique prise du sommet du Piton SW du Cylindre (auteur : Mattin).


Données techniques : (Gorka Azkarate):

Tuqueta de Marboré :................... 31T x: 255877 y: 1730391 z: 3095
Col Cylindre-Tuqueta de Marboré :...... 31T x: ...... y: ....... z: 3083

FTer

vendredi 9 avril 2010

Les trois mille fantômes : Argarot Sud.

De la cime même du monarque des Pyrénées, l'Aneto, se déroule au sud-ouest une longue échine, transversale au faîte principal des Monts Maudits, séparant les hauts bassins d'origine glacière de Coronas à l'ouest et Llosás à l'est. Cette crête, qui de son extrémité méridionale, le Piton de Llosas (2899 m), domine la vallée du Vallibierna, offre dans son parcours plusieurs brèches et aiguilles. L'ensemble est connu comme Crête de Llosás.

Entre les deux brèches principales - la Brèche Inférieure, sous le Piton de Llosás et la Supérieure, au pied de l'Aneto -, cette crête, interrompue de brèches secondaires, s'étire à une altitude entre 3000 et 3100 mètres. Les aiguilles les plus voyantes de cette partie furent explorées pour la première fois par Henri Brulle et son fils Roger, guidés par Germain Castagné lors de l'été 1913. Ayant conquis les deux aiguilles les plus hautes, Le Bondidier proposait dans l'Annuaire du CAF, en 1914, les baptiser des noms de Franqueville et Tchihatcheff en souvenir des deux premiers vainqueurs de l'Aneto. L'équipe Brulle, faute de temps, avait laissé la tâche en suspens, car l'aiguille méridionale restait vierge. Travail qui fut entrepris par Jean Arlaud et Henri Sabadie en 1920. Tout naturellement, ils proposèrent pour elle le nom d'Argarot, guide de la première ascension de l'Aneto, qui, depuis, reste associé à ses deux clients. (Alberto Martínez Embid. Aneto, el monarca del Pirineo. Ediciones Desnivel. 2002)

Alors que l'aiguille septentrionale, Franqueville, est le point culminant au sud d'une étroite et longue crête, la centrale ou Tchihatcheff se présente sous l'allure d'une aiguille monolithique ; la méridionale ou Argarot, de forme plus massive et étendue, possède la qualité d'avoir deux cimes. Détail qui n'a pas échappé au regard de quelques-uns des chercheurs contemporaines de trois mille tels que : Miquel Capdevila, Luis Alejos et le regretté Hipólito Maeso dans son parcours intégral des trois mille en 1999. Tous remarquaient l'apparente proéminence présentée par la cime secondaire de l'Aiguille Argarot placée au sud de la principale.

Vue sur la crête et ses aiguilles du versant de Coronas.


Cette cime secondaire a pour nous une signification particulière, car mesurer son altitude fut le germe de notre équipe de Chasse-fantômes. En été 2007 un ensemble de quatre pyrénéistes chevronnés, habitués des forums de Mendiak et Pirineos3000, parlaient de parcourir la crête de Llosás. Je leur suggérais de profiter de l'occasion pour mesurer au moyen de leurs GPS la proéminence de la cote en question, cote répertoriée dans la liste de Juan Buyse comme cote restante 1101. Ainsi fut fait le premier juillet et les résultats coïncident avec les estimations des dits auteurs : une proéminence, dans le petit col qui relie les deux cimes, d'environ 13 à 14 mètres. Nous avons pris le nom Argarot Sud suggéré par Miquel Capdevila dans son livre : Los tresmiles en treinta jornadas.

La voie normale est la même que pour l'Aiguille Argarot, à partir de la Brèche Inférieure de Llosás ou de ses abords côté Coronas, on atteint assez facilement cette antécime. Tous ceux qui sont montés avec idée d'atteindre l'Aiguille Argarot l'ont gravie sans aucun doute. Son sommet est une grande dalle plate de granit et présente vers l'Argarot un petit gradin adjacent à la cime qu'on grimpe avec facilité.

Sur la cime de l'Argarot Sud.


D'ailleurs, chaque fois qu'on effectue une étude en profondeur, comme l'a abordée ce groupe de pyrénéistes, la surprise peut surgir du lieu le plus insoupçonné. À partir de l'analyse des données fournies par GPS, nous nous aperçûmes que la place des aiguilles dans la carte Alpina était inexacte. L'erreur vient de la cartographie de base employée, celle de l'IGN espagnol, où nous voyons que l'Aiguille Centrale ou Tchihatcheff n'est pas cartographiée. Donc, il manque une aiguille dans les cartes. Les Éditions Alpina en essayant de représenter les trois aiguilles sur une base erronée, donnent le nom d'Aiguille Tchihatcheff à l'Argarot, mais alors où placent-elles celle-ci ? Bien sûr, à la place de l'Argarot Sud. Immédiatement nous avons transmis nos données à l'Éditeur qui les a reçues avec plaisir. Il remania sa cartographie dès 2008, en plaçant au bon endroit les trois aiguilles traditionnelles et nomma la cote 1101 de Buyse du nom d'Argarot Sud.

Waypoints pointés dans l'édition ancienne de la carte Alpina. Remarquez l'emplacement incorrect des aiguilles.


Révision de la carte Alpina de juillet 2008 avec l'emplacement des aiguilles remanié.


Consultez l'activité dans les liens suivants :
Mattin : Crête de Llosás
Igertu : Crête de Llosás

Données techniques :

Argarot Sud :..................... 31T x: 306948 y: 4721922 z: 3039,1
Brèche Argarot Sud-Argarot :...... 31T x: 306956 y: 4721959 z: 3024,9
Aiguille Argarot :................ 31T x: 306955 y: 4721997 z: 3040,3
Brèche Argarot-Tchihatcheff :..... 31T x: 306990 y: 4722029 z: 3013,1
Aiguille Tchihatcheff :........... 31T x: 307021 y: 4722035 z: 3049,2
Brèche Tchihatcheff-Franqueville : 31T x: 307041 y: 4722053 z: 3015,5
Aiguille Franqueville :........... 31T x: 307122 y: 4722076 z: 3068,6

FTer

lundi 1 mars 2010

Le problème de la proéminence.

N'importe quelle liste qu'on prétend réaliser de n'importe quel massif montagneux on se heurte à un grave problème : toute manifestation de la nature est un système chaotique. Les prémices d'une liste consistent à mettre de l'ordre dans l'univers étudié et, de par sa nature même, le chaos ne se laisse pas facilement classer.

Ces systèmes ont une caractéristique en commun : étudiés de loin, ils semblent offrir un ordre dans lequel les points qui se détachent paraissent facilement identifiables. À mesure que nous nous rapprochons, c'est à dire que nous augmentons l'échelle de mesure en réduisant l'étendue de terrain à examiner, nous trouvons que cet ordre-là, que nous voyions de loin, est reproduit avec des éléments semblables. D'importance mineure certes, mais pas moins réels. Donc nous pourrions poursuivre en théorie ad infinitum. Dans les études contemporaines de systèmes chaotiques, ceux-ci sont représentés graphiquement sous des formes présentant un caractère fractal. Un système montagneux est un exemple net de fractale. En mettant seulement une limite à l'échelle de mesure nous pourrons énumérer ces éléments qui nous intéressent. Une variation quelconque de l'échelle change le nombre d'éléments considérés.

En n'oubliant pas cela, il est facile de percevoir où est le problème pour élaborer une liste de montagnes : cette même liste variera suivant l'échelle que nous utiliserons. Ainsi, dans une liste mondiale de pics, pour les Pyrénées, ne figureraient tout au plus que deux dizaines de sommets ; mais dans une liste limitée à cette chaîne, les sommets dénombrés seraient de plusieurs centaines. À mesure que nous entrons dans les détails, les cimes secondaires qui passaient inaperçues dans une vision générale, prennent plus d'importance. Le pyrénéisme, depuis ses débuts, essaie de fouler les points les plus hauts des montagnes. Ces sommets sont donc l'objet de notre étude. Durant la longue période pré-pyrénéiste, le Midi d'Ossau était connu sous le nom que distinguait les deux pointes principales bien visibles de loin : Jean et Pierre. Personne ne s'intéressait à rien d'autre de cette montagne. Avec l'avènement du pyrénéisme la montagne est explorée à fond et on y découvre, en dehors des deux principaux, de nouveaux points hauts qui reçoivent un nom : Pointe d'Aragon, Pointe de France, Aiguille Jean-Santé, Doigt de Pombie, Main de Pombie, Piton Sud-Est... L'échelle sous laquelle la montagne est observée a changée.

Il faut noter que notre limite d'altitude, les trois mille mètres, est absolument insignifiante dans ce cas. Le même problème se présentera en essayant de dénombrer les deux mille ou la totalité des cimes dans les Pyrénées.

Historiquement les trois mille pyrénéens ont pris une signification à partir du moment où ils sont cités par les premiers pyrénéistes qui explorèrent la Chaîne. Dès lors qu'une chose a un nom, elle commence à exister. Souvent le fait de recevoir un nom n'a rien à voir avec l'importance orographique mais avec l'humeur ou l'inspiration de celui qui baptisa. Dans la première liste des trois mille de Lorenzo Almarza nous voyons que malgré l'absence de cimes importantes, comme le Batoua ou Culfreda, sont citées les trois pointes qu'offre le Pic d'Enfer. La raison? La description faite par Russell de cette montagne.

Avec cette trame, il ne faut pas s'étonner des disputes et désaccords de ceux qui élaborèrent les listes des trois mille. L'orographie, de par sa nature, n'aide pas et les différentes sensibilités humaines ne sont pas le meilleur moyen pour parvenir à un accord.

Donc il semble raisonnable d'établir un paramètre mesurable qui servira de limite inférieure d'observation. Plusieurs études en proposent, tels que : altitude, dominance topographique, isolement... Il y a un paramètre qui se retrouve dans tous : la proéminence ou hauteur de culminance. On connait la différence d'altitude entre le sommet donné et l'ensellement le plus élevé, brèche ou col, qui relie avec un autre sommet encore plus haut.

Il a fallu attendre la deuxième liste de Buyse pour la remanier avec la nuance de la proéminence, cette-ci établie en 10 mètres. Pourquoi ce chiffre et pas un autre ? À l'heure d'élaborer le catalogue des quatre mille des Alpes on va choisir 30 mètres, la longueur de corde entre les relais à l'époque classique. On peut deviner la réponse : une proéminence supérieure aurait diminué de manière importante le nombre de sommets dans la liste, en faisant disparaître des cimes avec un nom donné. Ainsi, plusieurs sont là en ayant rarement les 10 mètres de proéminence requis, par ex. le Maubic par rapport au Pic Long, le Pic Maudit par rapport à la Pointe d'Astorg. Même dans la rigoureuse liste alpine on trouve des exceptions, comme le Mont Blanc de Courmayeur, inclus dans la liste des 82 quatre mille quand sa dénivellation du côté du Mont Blanc est inférieure à dix mètres. L'histoire et le nom valent aussi.

On peut juger que 10 mètres c'est très peu. Cela dépend de ce que nous voyons : une hauteur avec la dite proéminence en forme de colline, par ex. le Tuc del Collado de Coronas, peut se révéler ridicule, si en revanche elle a la forme d'une aiguille, par ex. le Gendarme d'Albe, elle commence déjà à inspirer un peu de respect.

Alors, qu'avons-nous ? Une histoire du Pyrénéisme qui remonte déjà à plus de deux cents ans, une liste de sommets nommés dans cette période et un facteur mesurable qui vient à corriger quelques-uns des excès de l'histoire. Cela dit, ce facteur, de la même façon qu'il dénie, confère.

Exemple de terrain aléatoire. Généré avec le logiciel Terragen.


FTer

mercredi 10 février 2010

Liste de trois mille de Lorenzo Almarza (1932).

Juan Buyse, en narrant l'histoire des listes de trois mille dans son livre, remarque, comme liste la plus ancienne, celle de l'Unió Excursionista de Catalunya, publiée en juin 1935. Il cite encore une liste parue en 1968 dans le Bulletin de Montañeros de Aragón. Il souligne l'étonnement, que lui donne cette liste, de trouver à une date relativement récente (nous sommes dans les années 80), quelques noms qui évoquent le passé, à côté d'altitudes en tout point bizarres. Il aurait dû davantage fouiner, puisque d'après les renseignements d'Alberto Martínez Embid, cette liste-là était la copie, en 1968, d'une liste beaucoup plus ancienne, apparue en 1932. Voila pourquoi c'est la première liste de trois mille dont nous avons connaissance.

Son auteur Lorenzo Almarza Mallaina fut membre fondateur de Montañeros de Aragón. La publication originelle eut lieu dans la revue Aragón nº 81 en juin 1932.

Voyons les mots que cette liste suggère de la part du Comité Directeur de Montañeros de Aragón :

"Il a surgi une initiative heureuse qui refonde idéaux, activités et ardeurs de tous ceux qui effectuent une recherche pyrénéiste. D. Lorenzo Almarza, notre Président d'honneur, un véritable patriarche des Pyrénées aragonaises, institue, au moyen d'un exposé et d'un règlement détaillé, un trophée à décerner à l'amoureux de la montagne qui réalise le meilleur palmarès sur un parcours de pics de 3000 mètres et plus.
"La compétition établie est de telle magnitude et importance, que l'honneur dispensé par notre Président honoraire en acceptant le management de cette activité à Montañeros de Aragón, vient confirmer l'affection vouée à l'entreprise, et l'identification de ceux qui composent cette famille pyrénéiste, avec qui il fut l'un des fondateurs.
"Sportivement, cette stimulation créée sera de la plus grande envergure, par la compétition qui s'établit entre les affiliés aux idéaux communs, dans la scène merveilleuse de la haute montagne aragonaise.
"Montañeros de Aragón ressent aujourd'hui comme jamais la satisfaction de voir élevée au sommet son oeuvre, et exprimée dans cette initiative la confiance aveugle, l'enthousiasme et la persévérance qui nous porte et portera toujours vers la nature suprême, énorme et abordable.
"Pour le Président honoraire notre habituelle dévotion et éloges.
"Le Comité Directeur de Montañeros de Aragon."

Qui a dit que la compétition en montagne est toute récente ?

En effet, on parle d'un concours avec un trophée pour le lauréat : la Coupe Almarza des 3000 mètres aragonais. Pour cela, il établit un listage de pics de 3000 aragonais, et quelques français frontaliers. Lorenzo Almarza pressentait l'avenir des listes de trois mille, car il remarque : "C'est la première fois que la liste de pics cités précédemment est publiée. Je ne doute pas qu'elle ne soit pas remaniée et augmentée; seulement je dirai que j'en ai gravi la plupart et que l'altitude que je leur attribue n'est pas vérifiée par moi-même. Si cette altitude est extraite de différents cartes et études, et en cas fréquent de divergence, j'ai opté pour celle que je crois la plus rationnelle."

Le concours, en accord avec celui établi par Jean Arlaud et ses camarades du G.D.J., est basé sur un nombre de points désignés pour chaque pic selon son altitude, nombre de points majoré pour ascensions hivernales, et une prime pour le dépôt à la cime du livre d'or correspondant.

Sans plus nous citons la totalité de cette première liste de trois mille pyrénéens :


Aneto3404 
Posets3371 
Maladeta3354(Pic Maudit)
Perdido3352 
Cilindro3327 
Maladeta - E3312(Pic de la Maladeta)
Vignemale3298 
Tempestades3289 
Sum de Ramón3259(Soum de Ramond)
Marmore3253(Pic Marboré)
Corbillone3246(Pic Cerbillona)
Espadas3226 
Central3223 
Perdiguero3220 
Oo3220(Pic des Gourgs-Blancs)
Montterran3218(Pic Montferrat)
Maladeta - O3204(Un des pics occidentaux de la Maladeta, probablement le Pic Sayó)
Rousell3201(Pic Russell)
Cuello de Alba3187(Probablement le Pic Mir)
Petard3178(Pic Schrader ou Grand Batchimale)
Munia3150 
Balaitus3148 
Pie3147(?)
Taillon3146 
Sierra Morena3144 
Royo3130 
Tapou3121 
Epaule3118(Epaule de Marboré)
Diente de Alba3114 
Maupas3110 
Pico de Alba3096 
Trumuse3086(Pico de Troumouse)
Infierno3081(Pic Central d'Enfer)
Araguells3077 
Pie del Infierno3073(Pic Occ. d'Enfer)
Valibierna3067 
Fondella3064 
Baquo3060 
Arollas3060(Pic Or. d'Enfer)
Boum3060 
Eriste3056 
Cuello M Perdido3049(Il peut correspondre à un des Pics Baudrimont)
Arruye3039(Mont Arrouy, dans Troumouse. Altitude 2888)
Gabieton3033 
Carmo Negro3030 
Beraldi3026 
Peña Blanca3025(Pic de Pène Blanque, dans Troumouse. Altitude 2905)
Algas3025 
Niscle3020(Pic las Olas)
Baccimalle3020(Cuspide de Bachimala, c'est la Grande Fache en double)
Tours3018(Tour de Marboré)
Torreta3012(Pic de la Forqueta)
Lausseras3010(Pic Robinera)
Casco3006 
Gran Fach3006(Pic de la Grande Fache)
Mulieres3005 
Bachimale3000(Pic Abeillé)

Un total de 57 pics, quelques-uns en vérité difficiles à localiser. Nous avons respecté la graphie et altitudes originelles, et ajouté entre parenthèses le nom actuel dans les cas possibles de confusion.

FTer

mercredi 20 janvier 2010

Les Trois mille pyrénéens.

Les mouvements tectoniques, il y a 35 millions d'ans, sont à l'origine de la collision des plaques ibérique et euro asiatique, c'est le germe d'un plissement qui donnera naissance à la chaîne montagneuse connue maintenant sous le nom de Pyrénées.
Durant des milliers d'années les trois mille n'existèrent pas dans les Pyrénées. Les sommets y étaient, mais on ne les avait pas mesurés et on n'en avait seulement qu'une vague connaissance. Pour les populations primitives, pour celles qui habitaient la partie centrale de la chaîne ou celles qui l'observaient de loin, il existait des montagnes qu'elles supposaient plus hautes que d'autres, puisque ce n'est pas sans raison qu'elles sont caparaçonnées de neige une bonne partie de l'année. Leurs formes ou ensembles de cimes auraient inspiré plusieurs noms pour elles, mais il n'y avait pas de notion claire sur la structure complexe des cimes et vallées, excepté quelques passages fréquentés depuis toujours. Ce savoir-là appartenait aux habitants les plus proches et ceci leur suffisait pour profiter des ressources que la montagne mettait à leur portée au cours des saisons; ayant assez de travail, ils ne se préoccupaient pas de divulguer cette connaissance, au cas où quelqu'un eût voulu la connaître.
La définition du "Système métrique des poids et mesures" de la France révolutionnaire de 1799 et sa lente adoption (dans les royaumes d'Espagne en 1849), les travaux topographiques accomplis pendant les XVIIIème et XIXème siècles et la fascination produite par les chiffres ronds, donnent lieu à la naissance des trois mille pyrénéens, ceux qui sont retrouvés dans les premières listes de sommets que les officiers géodésiques et ultérieurement les cartographes élaborent. Les voilà, avec de noms qui, aujourd'hui nous semblent bizarres et en même temps familiers, mélangés avec d'autres cimes moins élevées, dans l'attente d'être découverts par les pyrénéistes naissants. Ceux qui, comme ailleurs, depuis le versant nord initialement, commencent par diriger leurs regards, puis leurs pas, vers les sommets les plus hauts.

Les listes des trois mille.
Tout au long des deux cents ans d'histoire pyrénéiste beaucoup de listes des trois mille ont été établies. Il y a une caractéristique commune à toutes : c'est qu'elles reposent sur les précédentes en y ajoutant quelques cimes, chose normale en l'absence d'une étude approfondie du sujet. Compte tenu de la complexité orographique, on trouve toujours une nouvelle hauteur qui, aux yeux de ceux qui la remarquent, a autant voire plus de mérites que celles existantes. Cette caractéristique concerne toutes les listes, y compris les plus actuelles. Et ainsi, par accumulation, le nombre des trois mille va en augmentant. Ces listes que nous connaissons, nous essaierons de les reporter toutes dans ce blog. Il est intéressant d'observer comme chaque fois, avec le temps qui passe, de nouvelles cimes s'ajoutent.

Le cirque de Gavarnie, dessin de Franz Schrader d'après nature. Nouvelle géographie universelle, t.2: La France, 1877.


FTer